Ceux qui rêve de la banlieue sont ceux?
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Se mettre au vert sans pour autant trop s’éloigner de Paris … Tel était, à la mi-mai, le rêve exprimé par de nombreux Franciliens ayant vécu le confinement comme un véritable enfermement.
« Ceux qui ont dû traverser cette épreuve dans de petites surfaces ou dans des logements ne disposant pas d’extérieur ont tous, à un moment ou à un autre de ces deux mois, aspiré à quitter la ville au profit d’un cadre de vie plus agréable », constate Michel Platero, président de la FNAIM du Grand Paris.Cette envie de verdure s’est d’ailleurs traduite dans les faits par une augmentation des recherches de biens dans certaines communes, notamment de la grande couronne.
«Cette banlieue est une République au sens d’organisation idéale et idéelle, où nul ne pénètre s’il n’est géomètre et dont sont bannis les éléments vivants et indésirables», écrit Philippe Mottet.
Dans les trois romans analysés dans son article (des romans québécois ici, ce qui suppose une certaine convergence entre les discours québécois et américains sur la banlieue), les représentations de la banlieue supposent le même impérialisme, le même refus de l’intériorité qui caractérisent la conquête de l’espace nord-américain (c’est moi qui fais le lien avec la conquête, Mottet ne va pas jusque-là).
La vie en banlieue se veut elle aussi, avec les contradictions que cela suppose, «pure extériorisation» : tout écart au conformisme est refusé, la nature est domptée, réduite aux desseins humains, la vie est dictée par des règles strictes où l’individu ne dispose ni de temps ni d’espace pour se retirer en lui-même.
Cette mobilité physique (et sociale) évoque de manière lointaine les pionniers partis vers l’Ouest (ou vers le Nord, dans le cas du Québec) avec l’espoir (souvent déçu) de trouver la prospérité. Auteur inconnu. Année inconnue.
» (30) Des forcenés qui voudraient museler pour continuer à ignorer. Qui donnent le sentiment de s’en prendre à la fois à ces prétendues identités différenciées, et à la maison réservée aux ajoutés, à savoir celle qui a été nommée banlieue. Pour assigner sans culpabilité, il leur faut l’image négative comme alliée.
Ahlème et Foued, des destins genrés ?
La banlieue est un univers demeuré assez longtemps séparé pour avoir développé son propre ensemble de normes chez une partie de ses jeunes, qui ont créé une microsociété en rupture, contre-dépendante des valeurs d’une société dominante dont ils se sont sentis exclus.
Appelés trop longtemps « jeunes des cités », « jeunes issus de l’immigration », ils ont fait de ce territoire assigné un lieu de repli, un refuge aux modes de vie inédits et parallèles, pour revendiquer une identité différenciée face à leur exclusion sociale. Des jeunes qui ont pris le parti de consommer une rupture qui leur avait de fait été imposée.
Ces valeurs, ces codes et ces façons d’être, Foued, le frère adolescent d’Ahlème les a adoptés. Foued fait partie d’une génération « mec light » (91), une génération de jeunes beaux gosses crâneurs, mais surtout de jeunes qui sont interdits de rêver.
Militante du « droit au rêve », Ahlème doit composer avec ce frère un peu perdu, dont les potes s’appellent « Cafard, Poison, le Vif, Magnum, que des grands « C’est la famille, c’est le ghetto » (97).
Pour le reste, ce sont surtout des raisons économiques ou pratiques qui motivent leur choix.
Paris, choix de la raison, mais pas du coeur
Mais pourquoi ces parisiens rêvent-ils de se faire la malle ? Les réponses sont assez évidentes, le coût trop élevé de la vie pour 62% des interrgoés, ou une vie souvent jugée trop stressante .
Nombreux sont aussi ceux qui souhaitent se rapprocher de la nature. Cependant quitter la capitale n’est pas facile, beaucoup de parisiens ont peur de ne pas retrouver la même richesse culturelle, et 13% ne pensent pas partir avant l’âge de la retraite, considérant qu’il est préférable de dérouler tout le reste de leur carrière dans la capitale.
Parmi les Parisiens déclarant ne pas souhaiter quitter Paris, 17% choisiraient tout de même de quitter la ville si leur employeur leur offrait la possibilité de travailler depuis n’importe quel autre endroit en France. On trouve donc un attachement à une carrière, plutôt qu’à un confort de vie.
Il existe des formes urbaines. Les Etats et empires du Lotissement Grand siècle se présente comme une série de textes qui sont autant de jeux : de points de vues, de pastiches, de réagencements de codes littéraires venus du Grand siècle.
J’écris de la littérature pour le plaisir et parce que les outils de la littérature me paraissent un moyen valable d’ouvrir des pistes de réflexion sur les enjeux du monde – questionner plutôt qu’affirmer : voilà pour moi l’essentiel. Encore faut-il poser la bonne question. Pourquoi les pavillons de banlieue ne font plus rêver personne est précisément celle que je ne me suis jamais posée.
Le livre tente plutôt de répondre à celle-ci : Pourquoi les lotissements en ruine feront, peut-être, rêver les nomades futurs ? Nuance. Fanny Taillandier
Les banlieues sont peuplées de populations obligées de vivre ensemble mais qui rêvent toutes de réussites individuelles. Contradiction totale. Les jeunes pillards volent pour eux-mêmes. Ils veulent prendre l’ascenseur social de force, si possible sans travail ni discipline. Les Français d’ailleurs, tous ceux qui ne vivent ni dans les bons quartiers des grandes villes, ni dans les banlieues, rêvent d’un pavillon synonyme de reprise de contrôle de leur existence.
«Le lotissement reste pour beaucoup l’endroit rêvé pour mener une vie indépendante lorsqu’on est jeune» affirment les sociologues Hervé Marchal et Jean-Marc Stébé.D’autres livres à ne pas raterLe reste est facile à comprendre. Qui dit pavillons dit éloignement, donc besoin de transports en commun qui fonctionnent et de services publics fiables pour la famille. Or les uns comme les autres se sont dégradés ces dernières années.
La colère est donc triple: colère, pour les classes moyennes, d’être expulsés du centre des métropoles en raison du coût du foncier, colère des banlieusards intégrés de ne pas pouvoir partir vivre en pavillon, colères des jeunes de banlieue qui intègrent l’idée qu’ils sont «mal aimés» puisque personne ne veut d’eux ou ne veut vivre à leurs côtés. Le pavillon n’est pas qu’une passion française.
Il y a les incessantes disputes de palier entre Madame K. et Madame B., les plantes de C. et P. qui colonisent la montée d’escalier, les piscines qui s’installent l’été sur les toits des bâtiments à la grande indignation de ceux qui vivent en dessous, des cris qui se transforment au fil des récits en rires… Ou encore, Favour, 8 ans, la petite fille que j’accompagne chaque semaine, qui a découvert, parmi les pierres délimitant l’accès au stade, des nuées de coccinelles.
1, 2, 3, 10, 25, 50… Quel gamin des beaux quartiers se lancerait, un samedi aprèm, dans une chasse aux insectes improvisée ?»Sofiane (1), 15 ans, lycéen, Les Ulis (Essonne) «Est-ce que je veux être comme les grands ?»«Les grands buildings ? Les grands rêves ? Non, rien de tout ça, je veux parler des grands de la cité.
C’est le lieu où ils crèchent… On les entend rire depuis l’autre bout de la cité. Ce sont des gens marrants pour les uns, bruyants pour les autres.