Comment rêvé avec la poésie?
Share
Please briefly explain why you feel this question should be reported.
Please briefly explain why you feel this answer should be reported.
Please briefly explain why you feel this user should be reported.
L’oeuvre met imaginairement en acte l’esprit de conjectures qu’appelaient les Pensées sur l’interprétation de la nature et par sa représentation tente de créer l’atmosphère nécessaire à son développement réel. La poétique du rêve s’accomplit dans une rhétorique. 22L’ancrage physiologique du rêve, sa corporéisation, correspond chez Diderot à une sortie du dualisme cartésien. Ce sont des corps qui rêvent, de la matière sensible qui rêve.
Le rêve en l’être pensant effectue des liaisons inattendues qui sont peut-être des intuitions de génie. Ce « peut-être » que maintient en suspension la pensée rationnelle de Diderot est organisateur du Rêve de D’Alembert. Les maîtres mots de l’ouvrage ne sont-ils pas : « qui sait ? » et « pourquoi non ? ». La rhétorique du rêve, sa vivacité, son énergie communicative se chargent de faire le reste.
Ce qui peut être advient dans le texte pour mieux advenir dans la conscience du lecteur. Ainsi, chez Diderot, le rêve en poésie s’avère un vecteur de propagation de la pensée ou plus justement une stimulation de la capacité à sentir et penser.
L’incomplétude de la poésie est donc à l’image de l’incomplétude de la réalité, condamnée à n’être perçue que de manière fragmentée et fragmentaire par le poète. Selon York, il s’agit d’un moyen pour créer de la magie. Il écrit : « absence (…) is a crucial factor in attaining magic. Poetry is, here, an experience of incompleteness; it points towards another place, another time[38] ».
Le paysage et le monde brumeux, dépeints dans « Cape Breton[39] », représentent la métaphore de l’acte poétique et créatif. La vue y est supplantée par « la vision imaginative[40] ». Ce poème s’achève sur la référence à un rêve « [t]he thin mist follows / the white mutations of its dream[41] ».
On peut observer que le poème ne comporte que deux rimes « all stand / with their backs to the mainland[42] » qui ancrent la stabilité dans le paysage immuable. Toutefois, celui-ci est condamné à changer à cause du brouillard énigmatique, source de rêveries. Le rêve, là aussi, est associé à un voyage en bus « the bus starts[43] », tout comme dans « The Moose ».
Chez Bishop, le déplacement géographique est avant tout un moyen de déplacer la psyché mise en péril par la fixité se rapprochant de la mort.
Cet effet très particulier a partie liée avec le rêve par proximité thématique, rhétorique, mais surtout par son fonctionnement : condensation et déplacement qui surdéterminent certains éléments comme le doute (du personnage comme du spectateur), le désir de protection contre la violence extérieure (du temps et du mari), les chevaux (emblèmes possibles de l’acte sexuel), l’opposition entre la parole et l’acte (monter les chevaux, raconter son rêve sans le montrer), l’âge déployé dans l’opposition entre petit et grand (la maquette et les écuries, le poulain et la haridelle).
Effet proprement impur puisqu’il fait se heurter la logique des images et celles du langage, les représentations de choses et de mots. Le prodige incroyable du rêve en commun est ainsi déplacé : c’est le spectateur qui le vit grâce à un dispositif narratif qui sème le trouble, le frustre d’image pour mieux le soumettre à un déferlement d’émotions contradictoires.
23 Cocteau Jean, Opium (1930), in Romans, Poésies, Œuvres diverses, Paris, Le Livre de Poche, « La Poc (…) 30Pour finir, un dernier exemple en forme de conclusion, rejouant de façon encore différente la configuration poétique qui conjoint la tempête, l’effetrêve et le désir frustré.
Cette ultime variation se trouve dans La Chute de la maison Usher, où Epstein mélange la nouvelle homonyme de Edgar Poe avec celle du Portrait ovale : Roderick, peintre obsessionnel, s’acharne à faire le portrait de son épouse Madeline.