Eko atlantic quand lagos se rêve en dubaï africaine?
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Devant le paysage lunaire qu’offre la gigantesque étendue de sable, il est difficile d’imaginer une avenue principale aux dimensions des Champs Elysées à Paris, des gratte-ciels dignes de Manhattan, des marinas et des appartements somptueux surplombant l’Océan Atlantique. Le plus grand chantier immobilier en cours sur le continent africain est pourtant censé devenir « la Dubaï de l’Afrique » d’ici 15 ou 20 ans.
La ville d’Eko Atlantic va s’étendre sur 10 km2 le long de l’île Victoria, à Lagos, et pourra, à terme, accueillir 250 000 habitants et 150 000 travailleurs qui chaque jour rejoindront les bureaux du centre des affaires et les centres commerciaux et restaurants de bord de mer.
Les images de synthèse des tours modernes et des avenues aux trottoirs immaculés contrastent cependant nettement avec les ruelles chaotiques des quartiers populaires de Lagos, où s’entasse la grande majorité des quelques 15 millions d’habitants.La suite après la publicité Entièrement construit sur des tonnes de sable dragué au fond de l’océan, le projet avait pour but initial de contrer les agressions de l’Atlantique, qui a grignoté des centaines de mètres de littoral, à cet endroit.
Pour quâ€TMEko sorte des eaux, il a fallu, avec lâ€TMaccord du gouvernement, dresser une muraille de 8 kilomà ̈tres au large, déverser 100 000 blocs de ciment brise-lames de 5 tonnes chacun, puis ensabler la zone pendant prà ̈s de sept ans – avec 140 millions de tonnes de matériau.
Dans dix ans, vingt ans peut-Ãatre, depuis le bureau de Gabi Massoud, on devrait voir une noria de téléphériques assurant des navettes entre les quartiers de la lagune, un train monorail allant jusqu’au Bénin, une immense zone franche concurrençant les plus grandes de la planà ̈te… Avec toujours plus d’hà ́tels de luxe, de gratte-ciel, de routes. Lagos ressemblera alors à Dubaà ̄. «Enfin, ça, c’est l’idée que veut vendre le gouvernement.
Mais pour l’instant, ça rame, nuance Gabi Massoud. Il faudrait déjà que l’Etat offre des services, de la voirie, de l’électricité. Mais à Lagos, on ne peut plus attendre le gouvernement.
Citons en exemple le projet d’Eko Atlantic dans la ville de Lagos au Nigéria, qui se rêve d’être la “Dubai Africaine”, un projet titanesque qui se heurte cependant à des difficultés dans sa mise en oeuvre. L’architecte américano-nigérian, Mariam Kamara, affirme que les villes africaines « construites au début de la colonisation, exhalent une structuration de l’espace urbain qui ne tient pas compte de nos modes de vie.
Pour corriger le tir, il s’agit non pas de revenir deux cents ans en arrière, mais de regarder en face nos réalités économiques, notre identité, afin de définir nos propres règles architecturales. ». Cette vision de l’urbanisme où les héritages coloniaux sont réappropriés pour une architecture à la fois innovante et pragmatique est partagée par nombre de penseurs et concepteurs de ville.
C’est le cas notamment de la ville nouvelle Yennenga au Burkina Faso, dont la conception a été confiée à un consortium de cinq architectes qui avaient pour mission de proposer un ensemble innovant tout en tenant compte des spécificités du lieu.
MOISE GOMIS / AFP Lorsque le baril dépassait encore les 100 dollars et que la corruption et le blanchiment d’argent dictaient encore l’économie du Nigeria, il était facile de se prendre à rêver du « Dubaï de l’Afrique ». Mais aujourd’hui, la première économie du continent se remet doucement de la terrible récession de 2016-2017 et Eko Atlantic tourne au ralenti. Pis, les Lagossiens commencent à ressentir les effets dévastateurs du projet sur le littoral des communautés environnantes.
Chercheurs et habitants des quartiers en aval d’Eko Atlantic affirment que la digue n’a fait que repousser la colère de l’océan ailleurs, qui se déchaîne sur d’autres quartiers. « Avant Eko, nous avions de la nature, des palmiers et des cocotiers », raconte à l’AFP Wasiu Elegushi, propriétaire historique des terres d’Alpha Beach, un quartier de la petite classe moyenne, à environ 12 km à l’est du projet de construction.
» Autrefois lieux de villégiature pour la classe moyenne de Lagos, les beaux appartements avec vue sur mer construits à Alpha Beach il y a un peu plus de dix ans ont été repris par les squatters.
La vague irrationnelle de constructions se fait sans plan d’urbanisation, des immeubles se dressent, des maisons se transforment en magasins, sans respecter les obligations de places de parking, augmentant encore plus la congestion de la ville. Au large des «îles», on a ensablé l’océan Atlantique pendant plus de sept ans, sur onze kilomètres carrés, pour agrandir Lagos. Eko Atlantic sort de terre, bâtissant un rêve de Dubaï en Afrique.
Il semble bien plus facile d’engager des travaux de titans, contre la nature, que de désengorger la mégalopole. «Cette ville est une catastrophe, constate Kunle Adedeji, autre architecte «nigéro-britannique» repat, fraîchement rentré au pays. Eko Atlantic n’est qu’un pansement sur une plaie suintante. Il n’y a qu’une solution, c’est de faire le ménage. Il faut détruire, compenser, et reloger. Il faut tout détruire, et tout recommencer à zéro.»