Film gai qui face rêve?
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Plus que de rêves, il est ici question de fantasmes. Ceux que l’on enferme à double tour à l’intérieur de soi. Ceux que l’on n’ose pas avouer à l’Autre. Ceux que l’on ose parfois explorer et exacerber de façon frontale. Ceux, globalement, qui relient au lieu d’éloigner.
Signés par la fine fleur du cinéma français fantasmatique des années 2010, les trois courts-métrages sexuels et baroques d’ »Ultra Rêve » constituaient donc la sortie inratable et cohérente de cette fin d’été, tant ils semblent être chacun à leur manière des songes mélancoliques où l’on tente de revivre et/ou de retenir une chaleur qui s’apprête à s’éloigner et/ou à disparaître.
Il en est déjà question dans « After School Knife Fight » de Caroline Poggi et Jonathan Vinel, où un groupe de rock doit se séparer suite au départ futur de leur chanteuse, ce qui plonge un de ses membres dans le spleen amoureux, faute d’avoir su déclarer son amour à celle-ci.
Le programme est dense : il est ici question du rêve déchu d’un amour que l’on aurait rêvé éternel, du mystère du désir, du plaisir, de la beauté hypnotique de la nuit qui réveille les ardeurs et change les visages… Chaque personnage se dévoile progressivement, par le biais d’une parenthèse fantastique ou onirique, entre humour grivois et confidence à fleur de peau.
Yann Gonzalez parvient à matérialiser les rêves les plus fous, les scènes les plus improbables, plongeant sa « chienne » dans une spirale infernale de sexes alors que son corps se flétrit, opposant le temps d’une scène délirante Eric Cantona et Béatrice Dalle pour une inspection au bord du grotesque mais finissant par troubler par ce qu’elle raconte de la sexualité de ceux qui regardent.
Si l’orgie délurée n’aura pas lieu, la sexualité est omniprésente et le film travaille le cerveau autant que la libido. Par la force des mots, des récits, des visages magnifiques de ses acteurs, de l’érotisme. Ce qui peut paraître ridicule finit par exciter la minute suivante, ce qui apparaît comme tordu se révèle romantique d’une scène à l’autre.
Il n’est plus qu’un déchet qui ne veut plus croire en rien et qui se met à boire en permanence comme pour reproduire une sorte de malédiction. Malgré ce portrait peu glorieux, Paul, fou amoureux, va s’accrocher et se mettre en tête de sauver George, voulant à tout prix, comme le titre français du film l’indique « Y croire encore ». Quand la magie et l’innocence d’un premier amour se transforme en une passion destructrice…
Si la mise en image peut rebuter, le scénario ne manque ni de charme ni d’émotions et les comédiens, pour la plupart amateurs, s’en sortent avec les honneurs. En filigrane se dessine une histoire d’amour pure et tragique entre deux garçons contraires. Le regard tour à tour fataliste et humaniste de l’auteur sur sa galerie de personnages à fleur de peau donne envie d’aimer ce film fragile en dépit de ses défauts…
Film produit en 2013 et disponible sur la plateforme de Films LGBT Queerscreen
, le soupçon que le bonheur sera toujours ailleurs, insaisissable, qui fait de cette petite utopie unanimiste un film plus profond qu’il n’y paraît. Soudain, le récent Homme de sa vie de Zabou Breitman, apparemment aux antipodes, ne paraît plus si éloigné. A chacun de décider s’il préfère son cinéma explicite ou bien baigné de mystère.
En l’occurrence les deux approches paraissent également valables.Shortbus, de John Cameron Mitchell (USA 2006), avec Sook-Yin Lee, Paul Dawson, PJ DeBoy, Lindsay Beamish, Raphael Barker, Jay Brannan, Peter Stickles, Justin Bond. 1h42