Comment la nouvelle réaliste met-elle fin au rêve romanesque?
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Le mimétisme du rêve est ainsi limité par la vérité romanesque que l’écriture de la nouvelle institue. Afin de rétablir le rêve carnavalesque, subversif dans ses droits, Edith Borchardt a tenté de substituer le cadre réaliste de la nouvelle par celui d’une autre forme littéraire : la menippea, nommée d’après le parodiste cynique Ménippe[40]. Cette forme de satire semble en effet bien correspondre à la nature dérisoire des aventures qui s’émancipent du sens global du monde.
Or, l’aventure moderne, telle que Simmel la décrit, est également une forme de vie qui vise à restaurer l’unité de l’existence. Le « rayon de lumière triomphant » qui, à la fin de la Nouvelle rêvée, se glisse dans la chambre du couple, semble signaler l’achèvement, la métamorphose finale, des expériences ratées que les époux ont vécues. On pourrait y voir le rayon du sens que la nouvelle en tant qu’œuvre d’art projette dans l’espace mimétique du rêve.
Et en effet, le rêve d’Albertine marque une fissure intérieure à la nouvelle qui empêche que le sens – donc le récit – se ferme. L’aventure pourra à tout moment renaître. Cette obstination, peut-elle confier une durée, une signification aux événements d’apparence insignifiants[43] ? Ou finit-elle par fixer définitivement leur dépravation ? La compulsion de répétition Dans la Nouvelle rêvée, des événements vains se répètent sans aboutir à une expérience concrète.
Le monde moderne qui prend forme (ou qui accélère) au tournant de 1850 est peuplé d’individus d’autant plus « libres » que l’idée d’origine se perd au profit de commencements sans attaches, que la durée ne se saisit plus que dans la nostalgie, que la reconduction des états et des valeurs le cède à leur évanescence et à leur singularité.
Le roman devient alors peu à peu un lieu de coïncidence avec le réel, non plus un espace où construire et penser la modernité, mais un espace où la refléter. 4L’esthétique réaliste est en partie le résultat de cette transparence, l’adéquation historique de la forme romanesque à la conception dominante du monde et du temps.
Jusqu’alors « décalée » — on pourrait dire « en avance » — par rapport à l’état du monde, la forme (ou l’informe) du roman échappait à l’idée de représentation pour se donner à lire comme espace de jeu, d’essai, de prospection. En faisant coïncider cet espace avec la réalité, le plein avènement de la modernité faisait soudainement de la forme romanesque, c’est-à-dire de sa forme informe, un double de la réalité.
Le roman est devenu un genre lorsque sa forme et les principes qui la sous-tendent ont cessé d’être uniquement sui generis pour exister aussi en dehors de lui et transformer les œuvres, jusque-là « résistantes » au monde, en œuvres « correspondantes » au monde.
Tout au long du roman, la religion est présente : Angélique se réfugie sous la voûte d’une église après sa fugue La maison des Hubert est juxtaposée à la cathédrale Elle souhaite se marier avec Jésus (chapitre 3) Dans la lecture, car Angélique ne cesse de lire et relire son livre d’inspiration religieuse (La Légende dorée) Le père de Félicien est évêque La fête de la procession des miracles, qui joue le rôle de révélateur au sujet du sang royal de Félicien Très symboliquement, la cathédrale est l’espace central du roman, du début (Angélique seule sous les voûtes) à la fin (mariage d’Angélique et de Félicien).
La présentation du bâtiment, dans Le Rêve, insiste bien sur cet aspect de centralité (aspect d’ailleurs ambiguë, entre vampirisation et procréation) :
Toute l’œuvre romanesque de Maupassant est ainsi porteuse d’une philosophie pessimiste, qui voit en l’homme un prédateur égoïste. À l’inverse, Malraux, dans L’Espoir comme dans La Condition humaine, révèle la faculté d’union et de solidarité des hommes. Il ne nie pas le malheur ni la souffrance, mais considère que des liens fraternels peuvent lier des individus pourtant uniques et différents les uns des autres.
• Enfin, le roman peut être une vision du monde, non pas au sens politique ou philosophique, mais au sens esthétique du terme. Une œuvre est faite de mots autant que de personnages, de rythmes et de sons, autant que de thèmes. Cet entrecroisement des motifs et de l’écriture permet de transmettre au lecteur un autre regard sur le monde.
Le lecteur est invité à se déplacer légèrement, à faire un pas de côté pour considérer, plus qu’une « vision du monde », un monde re-vu.
Trois genres de roman dominent le XXe siècle : Le roman-fleuve Le roman engagé L’autofiction Le roman-fleuve est surtout représenté par Marcel Proust. Avec À la recherche du temps perdu, il compose une œuvre unique et foisonnante qui a marqué profondément son temps. Il s’agit d’une comédie humaine dans laquelle il peint un portrait féroce de sa société et des différents milieux sociaux, particulièrement la bourgeoisie et l’aristocratie.
Il innove dans la narration en alternant la troisième personne dans Un Amour de Swann et la première personne pour le reste de la saga. L’ordre chronologique est rompu, le personnage-narrateur ne cesse de revenir en arrière, de repenser à des souvenirs révolus.Le roman engagé est principalement représenté par : Albert Camus, qui dénonce le totalitarisme dans La Peste publié en 1947. André Malraux, qui dénonce la guerre d’Espagne dans L’Espoir publié en 1937.
Céline, qui dénonce la guerre et l’aliénation de l’Homme dans Voyage au bout de la nuit publié en 1932. Le genre de l’autofiction se développe beaucoup. Il est particulièrement apprécié par les auteurs du XXe siècle car il permet de rendre obscures les limites entre auteur, narrateur et personnage.